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Lintelligence
de nos mains
École
dété 2014 de lISC : La science du web
et lesprit
Certains chercheurs recensent les
preuves archéologiques de pensée symbolique chez
nos ancêtres en Afrique, en Europe ou au Proche-Orient. Leur postulat est
que lorsqu’ils trouvent des traces de pensée symbolique, cela présuppose
forcément que ces hommes possédaient un système de communication
suffisamment élaboré pour partager avec les autres les significations
qui sont derrière les symboles utilisés (contrairement aux outils
dont la production peut être transmise par imitation). Bref, ils avaient
besoin d’un langage. Les objets matériels d’une culture
symbolique peuvent être des ornements personnels, des outils décorés,
des os et des pierres gravés, des sépultures, des objets trouvés
dans les tombes, des système de notation, des instruments de musique…
Tous ces objets portent des représentations qui n’ont
pas de lien iconique avec leur signification. Ils peuvent aussi faire
référence à des comportements non utilitaires présents
chez des populations humaines. |
Pourquoi
on ne peut avoir quenviron 150 vrais amis
Une
signature sociale constante et restreinte
Si le langage constitue certainement
un atout de survie important, ce n’est pas tant pour l’individu que
pour le groupe qui le possède. Car le langage est avant tout l’attribut
commun d’un ensemble d’individus et à ce titre, il favorise
la sélection de groupes et non d’individus particuliers. Il en va
ainsi pour toute communauté animale dotée d’un moyen de communication
efficace. À l’instar des humains, les fourmis ou les abeilles peuvent
par exemple réagir en tant que groupe à un événement
extérieur, devenant ainsi l’objet d’une évolution par
sélection de groupe plutôt que par sélection d’individus.
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"The first steps toward language
are a mystery." - Steven Pinker “ The question
of where language comes from may simply be unanswerable”,
- Richard
Lewontin "This task intrigues people because it's about us.
But that doesn't make it a scientific question. It may be important for us to
know where we came from, but if we can't answer that question scientifically,
we can't answer it. If you want to tell stories, well then, tell stories."
- Noam Chomsky | |
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L’origine du langage a donné
lieu depuis des siècles à de nombreux débats.
En 1866, la Société de Linguistique de Paris a même
déclaré cette question irrésoluble et a refusé
toute communication sur l'origine du langage. Comme la parole est
par essence quelque chose d’évanescent, on ne dispose
que d’indices indirects de son émergence. D’où
les innombrables hypothèses qui ont été formulées
sur l’origine du langage, toutes plus imaginatives et spéculatives
les unes que les autres.
On distingue d’abord ce que l’on
pourrait appeler les théories vocales de l’origine
du langage. Des modifications de la bouche et du pharynx (voir capsule outil à
gauche) couplées à une augmentation du volume cérébral
auraient conduit, il y a environ 100 000 ans, au contrôle volontaire des
productions vocales qui étaient jusque là plutôt des cris
instinctifs. On retrouve différentes variantes de cette approche.
Certains postulent que le langage humain vient du développement des onomatopées,
c’est-à-dire de l’imitation des bruits de notre environnement.
D’autres qu’il se serait développé à partir des
cris de joie, de douleur, et d’autres exclamations involontaires. D’autre
encore, et c’était le cas de Charles Darwin, avancent que le langage
oral proviendrait d’une imitation avec la bouche d’un langage gestuel
déjà existant avec les mains.
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Une autre hypothèse soutient que l’utilisation de sons symboliques
arbitraires se serait développée à partir des cris d’alerte
des primates pour informer de la présence d’un prédateur,
d’aliments toxiques ou comestibles, etc. Certaines, plus sophistiquées
encore, avancent par exemple que le langage humain est devenu élaboré
parce que nos cris et vocalises peuvent révéler nos états
d’âmes et qu’on peut ainsi apprendre à les imiter pour
obtenir certains privilèges et avantages sélectifs. | Un
autre courant est celui de la théorie gestuelle de l’origine
du langage. Elle postule que le passage à la bipédie aurait eu pour
première conséquence de libérer les membres antérieurs
et de les rendre utilisables pour la communication gestuelle. Dans un second temps,
le langage vocal se serait à son tour développé, rendant
ainsi les mains libres pour d'autres usages. Les travaux sur le langage
des signes utilisé par les personnes sourdes ont apporté des arguments
en faveur de la théorie gestuelle. Ces travaux ont montré que le
langage des signes était aussi sophistiqué du point de vue grammatical
que le langage oral. De plus, il solliciterait les mêmes « aires du
langage » de l’hémisphère gauche que les langues parlées
(voir la capsule outil à gauche), en particulier l’aire
de Broca, très proche des aires motrices des bras et de la main. La
théorie gestuelle de l’origine du langage expliquerait aussi la capacité
des chimpanzés à apprendre les rudiments du langage des signes comparé
à leur absence de compétence pour le langage verbal.
La théorie gestuelle
pourrait aussi expliquer pourquoi les outils de pierre des premiers hominidés
ont si peu évolué durant une période de près de deux
millions d’années malgré une augmentation de la taille du
cerveau : si les mains étaient utilisées pour communiquer, peut-être
étaient-elles moins disponibles pour perfectionner les outils ? |
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Pour les
tenants de la théorie gestuelle, la transition vers le langage parlé
s’est probablement fait progressivement jusqu’à il y a environ
50 000 ans, période où la parole aurait pris radicalement le dessus,
libérant ainsi définitivement les mains pour permettre l’explosion
technologique et artistique de cette époque.
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D’autres théories voient plutôt
émerger le langage de la complexité du monde social dans
lequel évoluent les primates. Elles s’opposent en cela aux autres
théories s’appuyant plutôt que sur l’échange d’information
sur l’environnement physique, pour augmenter l’efficacité de
la chasse par exemple. La théorie du « gossip » de
Robin Dunbar s’inscrit dans ce courant. Vers le milieu des années
1990, l’anthropologue anglais a attiré l’attention sur le fait
que la majorité de nos échanges verbaux sont consacrés à
prendre des nouvelles de notre interlocuteur ou d’une tierce personne (le
« gossip » des anglophones). Pour lui, la fonction première
du langage est donc d’échanger de l’information sur l’environnement
social de l’individu : qui est fiable, qui a fait des
alliances avec qui, bref le potinage habituel…
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Chez les primates, c’est l’épouillage
mutuel qui a cette fonction sociale, consolidant les hiérarchies et favorisant
la réconciliation après les conflits. À mesure que le nombre
d’individus dans les groupes augmentait durant l’hominisation, Dunbar
croit que le langage est simplement devenu plus efficace que l’épouillage
comme outil de cohésion sociale. | D’autres, comme
Jean-Louis Dessalles, affirment que c’est parce que l’homme est avant
tout un animal politique qu’il s’est mis à
parler. Convaincre un congénère de former une coalition ou de la
véracité de quelque chose qui ne se passe pas sous nos yeux, voilà
l’avantage que le langage aurait pu apporter à nos ancêtres.
Le langage serait alors apparu parce que les hominidés ont eu besoin d'un
moyen de choisir leurs alliés dans des groupes à l'organisation
sociale de plus en plus complexe. D’autres encore, comme Bernard
Victorri, mettent l’accent sur la nécessité qu’a eu
notre espèce, à un certain point de son évolution, de formuler
des lois pour gérer les crises découlant de la complexité
croissante du psychisme des membres d’un groupe social. Exprimé sous
forme de mythe que l’on retrouve dans toutes les sociétés
humaines, ces histoires racontées sous la forme « ça s’est
passé, ça pourrait se reproduire, il ne faut pas que ça se
reproduise » auraient pu favoriser l’émergence de la complexité
narrative propre à notre espèce. Mais peu importe les
mécanismes par lesquels le langage s’est constitué, une autre
question hante les linguistes depuis fort longtemps : celle de savoir si
le langage a été inventé une seule ou plusieurs fois…
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