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Sachant que l’adénosine
est libérée continuellement durant la période
d'éveil, certains chercheurs affirment que la caféine
serait plus efficace si elle était prise à petite
dose tout au long de la journée, plutôt qu’en
très grande quantité à des moments précis
comme lorsque nous buvons une grande tasse de café.
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CES MOLÉCULES QUI S'ACCUMULENT ET
NOUS ENDORMENT |
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Il semble que deux processus doivent
se superposer correctement dans l’organisme pour que l’on puisse s’endormir.
Le premier est un
rythme dit « circadien », c'est-à-dire réglé sur
une période de 24 heures par notre
horloge biologique, et qui orchestre la
sécrétion cyclique de plusieurs hormones dont
la mélatonine, impliquée dans le sommeil. Le deuxième
processus est l’accumulation de substances
« hypnogènes » durant les 16 heures
de la journée, substances qui induisent une envie
de dormir ne disparaissant qu’avec le sommeil.
L’endormissement ne serait donc possible que lorsque, d’une part,
votre horloge biologique a amené votre organisme dans une conformation
hormonale favorable au sommeil, et d’autre part que cela fait un bon moment
que vous n’avez pas dormi.
L’un de ces facteurs
hypnogènes les plus étudiés est l’adénosine,
une petite molécule qui agit comme neuromodulateur au
niveau de très nombreuses synapses du cerveau. Depuis
très longtemps, des antagonistes naturels des récepteurs
de l’adénosine sont ingérés par
l’être humain pour se garder éveillé plus
longtemps. La
caféine du café ou la théophylline
du thé, qui sont deux de ces substances, sont bien connues
pour leur effet stimulant. |
Représentation schématique
d’une molécule d’adénosine
(vert = atome de carbone; bleu = atome d’azote;
rouge = atome d’oxygène; blanc = atome d’hydrogène;
rose : atome de phosphore) |
C’est au début des années 1980 que la raison
pour laquelle tant de gens boivent du café pour se réveiller
devint évidente : la caféine, la substance psychoactive
du café, empêche l’adénosine de se fixer
sur certains neurones du cerveau.
C’est à partir de ce moment-là que
l’adénosine a commencé à intéresser
de plus en plus de neurobiologistes travaillant sur le
sommeil. Plusieurs expériences sur des animaux ont éventuellement
confirmé un rôle certain pour l’adénosine
dans le
cycle veille / sommeil : le blocage de son action augmente
le niveau de vigilance; l’injection d’un agoniste
de l’adénosine induit le sommeil; la concentration
d’adénosine augmente naturellement dans certaines
régions du cerveau durant la journée et diminue
durant la nuit; cette même concentration augmente
si l’on force l’animal à rester éveillé durant
la nuit; etc.
Ces expériences montrent donc que l’adénosine, avec
la sérotonine et la mélatonine par
exemple, est l’une des molécules dont la
concentration dans le cerveau influence la venue du sommeil.
Mais comment, exactement, l’influence-t-elle ? Pendant
l’éveil, l’activité
neuronale augmente le taux d’adénosine.
Par ailleurs, l’effet que produit l’adénosine
sur un grand nombre de neurones est inhibiteur. Et parmi
les neurones ainsi inhibés par l’adénosine
figurent ceux qui sont les plus actifs durant la veille,
soit les
systèmes à noradrénaline, à acétylcholine
et à sérotonine. Des expériences
ont par exemple démontré que lorsqu’on
élève artificiellement le taux d’adénosine
dans le télencéphale
basal, ses neurones qui projettent sur l’ensemble
du cortex produisent moins d’acétylcholine.
Cela entraîne par conséquent un ralentissement
de l’activité cortical et de la somnolence.
L’activité cérébrale
synchronisée caractéristique du sommeil
lent va alors pouvoir s’imposer et, au bout
d’un certains temps de sommeil lent, les taux d’adénosine
vont se mettre à décliner. L’activité des
systèmes responsables de l’état de
veille va pouvoir alors augmenter à nouveau, provoquant
le réveil et le recommencement du cycle. Il s’agit
là, à n’en pas douter, d’une
rétroaction négative très bien huilée
(voir capsule cybernétique à gauche).
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